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Pensée verticale
14 mai 2007

Orgasme, culture et pornographie

Les trois lignes ci-dessous rédigées émanent d'une étrange discussion, qui s'est déroulée hier soir tard, avec une certaine jeune fille.

C'est un peu en bordel, mal organisé, mais bon, ça parle de sexe. Donc c'est intéressant pour vous j'imagine.

« La pornographie est pour moi en contradiction avec la physiologie »

… Oui ! C'est parti comme ça ...

Bêtement dit, quand on aime pas, on baise mal ... Mais pourquoi ? Et qu'est ce que le sexe sans sentiment alors ?


Les références de virilité, d'endurance...d'abondance (vous me suivez je pense?), promues à longueur de pellicule par l'imagerie porno, ne sont que très marginalement liées à une quelconque capacité physique naturelle. En réalité, ces qualités sont en tout homme, à des degrés variables, en fonction de possibilités culturelles ou psychologiques. Il y a probablement des meilleurs que d’autres, mais la rencontre étant d’abord un truc qui se fait à deux, l’adéquation semble bien plus importante que la capacité.


Le bon coup n'existe pas. Mais, il nous arrive parfois d'en être un; c'est tout.
Il n'est pas une seule expérience personnelle qui n'ai confirmé cette idée chez moi.


L'endurance masculine, par exemple, est liée à mon avis au désintérêt, à l'altruisme du mâle envers la jeune fille. Le jour où j'ai compris cela, tout a été plus facile... Et on ne rit pas, car certains ne le comprendront jamais.


- Ainsi, l'acte sexuel égoïste (la masturbation ou l'utilisation du sexe féminin pour un comportement masturbatoire) est bref. Moins de la minute en clair... J'ai chronométré.


- L'acte amoureux, désintéressé, altruiste est long, corrélé au rythme de la demoiselle et bien souvent parfaitement maîtrisé. Le garçon dispose presque d'un véritablement bouton ON/OFF pour atteindre son orgasme (les mecs, c'est pas une blague: si vous avez un souci de timing, on la regarde dans les yeux et on se demande ce qu'elle pense... Et là, elle va pas vous reconnaître: un monde nouveau et merveilleux va s'ouvrir à vous !).


On peut se demander s'il est vraiment bienvenu de savoir ça d'ailleurs... Car le savoir permet de tricher un peu avec la nature, par des tactiques d'auto-suggestion. Pratique quand on veut faire son fier ! Là, elle a pas aimé l'argument, ma demoiselle à moi... L'homme ne simule pas certes: par contre, il peut se mentir à lui-même, se croire amoureux... ça marche vraiment dit-elle ? Naaaan, penses-tu ...

Il y a deux conséquences assez intéressantes à cette idée:

1 / Il y a une insécurité originelle forte du mâle dans les relations épisodiques assumées. L'homme est dans l'incapacité de dire s'il sera à la hauteur ou pas, dans ces situations ( dans tous les cas, en réalité). Le sommeil, son passif sexuel, son ouverture affective à la fille sont des conditions, parmi d'autres probablement, de sa ...force. La Nature est romantique finalement et l'image pornographie du mâle omnipotent est un mythe.

2 / Dès lors, il faut expliquer pourquoi l'acteur porno, par exemple, parvient "à assurer" ou pourquoi certains garçons sont des spécialistes des ... sauts de puces (oh la jolie métaphore).


Je pense qu'il y a une inversion psychologique, qui peut d'ailleurs devenir une pathologie grave, une perversion, c'est à dire, un déplacement du motif biologique d'excitation.

En gros, seul l'objet "sexe féminin", construit selon les codes de la pornographie est digne; d'excitation, d'érection, d'éjaculation abondante... Et ces codes sont devenus des codes sociaux. Les sentiments, l'altruisme auraient alors tendance à couper tous leurs effets à ces inhumains du sexe, alors que chez la personne saine, c'est précisément ce qui la rend virile (ou "ouverte").


Il ne faudrait pas croire qu'il n'y a là que sauvagerie: l'objet sexuel féminin est une pure culture, complexe, avec ses codes et ses règles. Il serait ridicule dans ce sens de vouloir faire des films porno d'auteurs. L'enchaînement classique, par exemple, de la fellation-levrette-sodomie-fellation finale est un incontournable, un code, une architecture de l'objet "acte sexuel". Le concevez vous d'ailleurs autrement, cet acte ? De quoi pourriez vous vous passer ? ou ne pas vous passer ?

Sans les sentiments, il ne reste plus que les apparences, l'esthétique ou la chorégraphie de l'acte. Avec quelques variations, s'il l'on veut: un peu de toilettage marketing.

Si l'on réintroduit des idées, des affects, l'objet d'excitation redevient flou et complexe ... Le film n'est plus bandant mais redevient une histoire. Par exemple, la nécessité sociale de mettre un préservatif dans les films X casse complètement l'élan... Très rare de voir la scène filmée. La chose n'a pas été objectivée comme acte digne d'excitation.


Ensuite, dans la multiplication des aventures (phénomène Meetic), j'ai beaucoup de mal à croire à un confort de la virilité masculine. D'ailleurs nombre de séducteurs ou de dragueurs ne vont jamais jusqu'au lit: bien trop dangereux... D'autres y vont à toute vitesse; l'objectivation du sexe doit alors fonctionner à fond. Ou alors j'ai raté un épisode...

Bien sur, et ce n'est qu'un détail, il ne faut pas négliger le coté pulsionnel. Mais, il est je crois, rare qu'il aboutisse à une rencontre complète immédiate. Il n'y a pas vraiment de raison pour qu'une pulsion forte soit immédiatement partagée par un partenaire de passage...(joliment dit, mais en général, c'est bien glauque).

Auquel cas, il n'y a rien de spécial à en dire. La pulsion est soit satisfaite immédiatement, soit confinée, éventuellement masturbée, seul ou ... au mieux, à deux. Lorsqu'elle l'est à deux, la garçon a plutôt du souci à se faire sur ces compétences. L'acte égoïste ne répondant pas à des normes sociales ou affectives, l'affaire va être vite pliée...

Le cas du papillon de Meetic donc : le butinage de fleur en fleur ... Comment assurer, si l'on exclut les sentiments  et le coté pulsionnel (hormonal)? Quel est la ressource ?

Seule la culture porno, encore une fois, vient en aide: le sexe est objectivé en pur acte mécanique, les sources d'excitations sont codées et donc fiables et je pense aussi renforcées par de fortes perversions. Le regard de l'homme sur les purs attributs sexuels de la femme est lui même une culture pornographique. Les objet "sein", "fesse" etc...sont socialement considérés comme des objets excitants, digne de consommation. La culture porno découpe : le corps de la femme (seins, fesses, jambes, chevilles...pieds pour certains etc), les thèmes sexuel (SM, lesbienne, pro, amateur, grosse, black, jeunes, vieux, à trois, à trente...). Ceci pour mieux concentrer et focaliser l'excitation du mâle. On pourrait même se demander si la radicalisation contemporaine de l'opposition entre hétéro et homo n'est pas une pure émanation de la culture porno. Parce que en réalité, hein , ... bref.

Dans les films de cul, les boites à partouzes, ou sur Meetic, on reproduit un acte, parfaitement maîtrisé et découpé. On consomme un produit dans la fiche technique est claire, efficace et performante.
On est excité parce que l'acte est considéré socialement comme lié à des objets excitants. Si le partenaire en lui-même n'a aucune importance, en revanche ses muscles ou ses gros seins correspondent aux critères sociaux reconnus d'objet sexuels. Et, cela suffit: érection et humidité sont au rendez vous.

Je rajouterais quelques aspects pour finir. En gros, on le vois bien: si l'on oublie les sentiments et les hormones, il reste le porno... Or, ces comportements d'objectivation du sexe (comme bien de consommation) sont parfaitement dangereux.

- aucun couple ne résiste aux boites à partouze. La destruction obligatoire des liens affectifs pour aboutir à la sécurité sexuelle des mâles les détruits. (Dixit une tenancière...). Beaucoup d'ailleurs sont des faux couples, couples d'amis, illégitimes etc... La femme doit être une simple cochonne, le mec un pur étalon, et cela suffit bien pour permettre les pénétrations sexuelles. De rencontre évidemment surtout pas: cela casserait tout. Les échangistes échangent non par ce-qu'ils sont partageurs, mais parce-ce que ce (ceux) qu'ils échangent, n'a pas une grande valeur subjective.

- le multiplication de ses comportements sexuels objectivés est appauvrissante. Il ne se passe rien du tout: regarder un film X est comme regarder quelqu'un qui mange: ça donne envie de manger. C'est tout. Mais, peu à peu, l'excitation par un objet sexuel délimité et reconnu socialement comme excitant se fait de moins en moins efficace. Le mac do, c'est lassant... Toujours identique, connu et répété, l'acte sexuel se vide; pas provisoirement jusqu'à la prochaine pulsion: mais définitivement car il est désinvestissement psychologiquement, cérébralement.

Seuls les sentiments et la vraie rencontre sont infinis.

Dès lors, deux solutions: où bien l'on arrête le sexe ( ce qui arrive bien plus souvent qu'on ne croit) ou les comportements deviennent de plus en plus hards, pour maintenir un niveau d'excitation stable. Au point que, dans "Les particules élémentaires", Houellebecq fait un lien direct entre la dépravation et l'ultra-violence, la torture, le meurtre.

Car au final, seul la mort excite. Pas la petite, mais la vraie...

Le sexe est une affaire grave; il est une rencontre, une petite anarchie dans les affaires de la société et une aventure impressionnante et fantastique.
La culture porno de mise en objet du rapport sexuel a pour conséquence directe une baisse de la capacité d'excitation des individus, une destruction de l'échange et la naissance d'une violence face à l'échec, l'impossibilité ou l'insuffisance d'un acte supposé performant. En même temps, elle crée la violence et tue l'envie et le désir.

Soyez amoureux ! Non pas parce que c'est plus joli mais parce que vous n'avez pas le choix... Il n'y a pas d'autres solutions.

Sinon l'on meurt à petit feu; ou alors, on fait mourir quelqu'un d'autre.

 

Voilà en résumé, la tronche de la discussion, hier soir, sous la couette... Ca rigolait pas. Enfin a priori. Par ce que vous ne saurez rien du prétexte...

 

J'ai été un peu long...cette fois.

Mais l'envie de vous (faire partager mes élucubrations) était tellement forte...

 

 

 

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