Success story

Une de mes activités virtuelles préférées consiste dans l'exercice trivial et grossier de la sociologie de comptoir. Je pense même à la création d'une catégorie dédiée.

Vous en reprendrez bien une louche ? Pour la route...

Depuis peu, le matin, pour me rendre là où le devoir m'appelle et, ainsi, sauver la démocratie en danger, je traverse Neuilly-sur-Seine.

Neuilly-sur-Seine, c'est un peu la Wisteria Lane de Paname: c'est beau, c'est propre, c'est rangé.

Sans blague, j'aimerai bien habiter Neuilly. Dans ce havre préservé de toute influence exogène perturbatrice, on a vraiment l'impression que le monde est beau, simple, facile. Sans risques.

A Neuilly, il y a des jolies pelouses bien vertes. Les immeubles ne bordent pas bêtement la rue, comme dans le XVIème... Quelle vulgarité. Les pare-terre de fleurs, qui les entourent poussent tranquillement; personne ne vient marcher dessus ou voler quelques pétales en guise d'offrande à une dulcinée, par souci d'économie (quel mot étrange).

Dans le bus, une dame style professeur de lettres ou de grec, appelle son mari.    
"Ecoute, j'ai pris le bus ce matin, c'est absooolument formidable..."      
A Neuilly, les bus sont formidables.

A Neuilly, il y a le Lycée Pasteur. Leur vaccin anti-pauvreté.

Etonnant, de voir les jeunes filles bien habillées, arriver en trottinette ou sur leur beau VTC rutilant, ravie de venir s'enrichir dans ce magnifique bâtiment d'époque, probablement ravalé une fois par an, afin que la pierre brille... Car, à Neuilly, la pierre brille et pas seulement à l'annulaire gauche des dames.

Dans la cour, les garçons jouent au ballon.

Il me semble bien aussi que les professeurs viennent dispenser leur savoir en trottinette... Parque c'est bien plus sympa ! Et puis, ici, les trottoirs sont larges et les habitants sont heureux de se croiser le matin.

A Neuilly, il y a des filles. Elles sont toutes, sans exception, absolument charmantes. Mais toutes, vraiment... L'argent rendrait-il belle ? Je ne suis pas le seul à penser cela. Avec quelque collègues qui n'ont pas non plus les yeux dans leur poche, on "bloque" un peu la dessus comme dit ma petite assistante; laquelle à l'air un peu timide, d'ailleurs, au vu de la concurrence.

C'est qu'à Neuilly, il n'y a plus de jolies étudiantes sans le sou, mal fringuée, qui vous regarde droit dans les yeux dans le métro. Sans gène et sans pudeur. Ici, les demoiselles sont sages, occupée et très bien habillée. Il y a de la fringue !

Pas par plaisir: présentation soignée obligatoire pour la "visio-conf" de 11 heures avec Londres. On est pas là pour papillonner.

A Neuilly, les filles ne vous regardent pas... L'éducation prime. Et puis surtout pourquoi faire ? Mariées et bientôt maman qu'elles sont, elles ont d'autres soucis...    
A Neuilly, il y a des mecs. Du mâle dominant je dirai même. Lunette de soleil hyper style sur costard-cravatte sombre. Kit main libre of course... La journée est déjà commencée. Il ne voit pas la mignonne qui passe devant lui... Il ne se passera rien. Le rapport d'audit doit être rendu dans trois jours: il va peu dormir d'ici là. Il y a aussi les petits mecs, les autochtones; des lycéens en blouson cuir prêt du corps, jean D&C et cheveux noirs en bataille... A la Arno Klasrfeld (qui refuse le débat soit dit en passant !). Total frime...prétention maximum...look de parvenu, à soir de mai à la Concorde.

Il fait bon, une légère brise du matin parfume l'ensemble...

Une dame arrose sa pelouse.

Monsieur part travailler dans sa Saab noire.

Constance pousse la grille et de rend à l'école. Tranquillement.

Le charme, pas très discret, de la bourgeoisie.

Mais quel est donc leur secret ? Une certaine accoutumance au succès peut-être...